
Carte d’Identité

Auteur : Head Quarter Simulation Game Club
Illustrateurs : Jocelyn Millet & David Chapoulet
Éditeur : Iello
Distributeur : Iello

Octobre 2021
Une description rapide
Prenez la tête d’une Cité-Etat de la Grèce Antique pour la développer et la mener jusqu’à la gloire !
Une partie se déroule en 9 manches, elles-même composées de 7 phases :
– Annonce de l’Évènement. Le premier joueur révèle la première carte de la pioche Évènement (composée de neuf cartes lors de la mise en place), et lit le texte à haute voix afin que tous les joueurs en prennent connaissance.
– Impôts. Chaque joueur gagne autant de Drachmes (pièces d’argent) que son niveau atteint par son curseur sur la piste des Impôts du plateau principal.
– Dés. Simultanément, les joueurs lancent leurs dés et les associent (secrètement) chacun àune tuile Action. Si la valeur du dé est inférieure à la valeur de la tuile attachée, il paient la différence en abaissant leur curseur Citoyen sur la piste correspondante du plateau principal. Ensuite, tous les joueurs révèlent leurs tuiles choisies.
– Actions. En suivant l’ordre croissant des tuiles, les joueurs appliquent leurs effets. Il existe sept tuiles pour sept actions différentes :
° Philosophie. Il s’agit d’obtenir un jeton Philosophie qui sera nécessaire pour faciliter l’action Politique ou Développement, augmenter son nombre de Citoyens ou exécuter une phase progrès supplémentaire.
° Législation. Il s’agit d’augmenter de trois son niveau de Citoyens et de piocher deux cartes Politique pour n’en conserver qu’une seule en main.
° Culture. Il s’agit de gagner autant de points de victoire que son niveau de Culture de son plateau personnel.
° Commerce. Il s’agit de gagner autant de Drachmes que son niveau d’Économie +1 de son plateau personnel et d’acheter un jeton Connaissance de la réserve contre 5 Drachmes.
° Militaire. Il s’agit d’augmenter son niveau d’Armée du plateau principal d’autant de cases que son niveau militaire de son plateau personnel. Ensuite, il est possible de coloniser pour obtenir un jeton Connaissance de son choix du plateau principal en ayant la force d’Armée nécessaire mais en la diminuant comme indiqué sur le plateau. Les jetons Connaissances sont de trois couleurs. Certains, plus difficiles à récupérer sont encerclés d’une couronne de laurier. La Colonisation permet également de récupérer les récompenses indiquées sous le jeton gagné.
° Politique. Il s’agit de jouer une carte de sa main en payant son coût et en disposant des prérequis (jetons Connaissance) nécessaires. Ces cartes ont des effets immédiats, permanents ou utiles en fin de partie.
° Développement. Il s’agit d’augmenter d’un niveau son curseur sur la piste de Développement spécifique à sa Cité-État en payant le coût éventuel et en disposant des prérequis (jetons Connaissance) nécessaires. Chaque étape débloquée donnent droit à des bonus d’actions immédiats, permanents ou en fin de partie.
– Progrès. Il s’agit de faire progresser son curseur d’un niveau sur une des pistes de son plateau personnel (Économie, Culture ou Militaire) en payant le coût demandé. Différentes récompenses peuvent être récupérées lors d’un passage d’un niveau à un autre, comme une augmentation d’impôt, de citoyens ou encore un dé supplémentaire.
– Résolution de l’Évènement. Il s’agit d’appliquer l’effet de la carte révélée en début de manche.
– Succès. Les joueurs vérifient s’ils réunissent les conditions d’un ou plusieurs Succès (10 points de victoire, 12 Citoyens, 6 Armées, niveau 4 d’Économie, 3 cartes politique jouées) pour gagner un Impôt ou une Gloire. Ils positionnent leur marqueur correspondant sur la case du succès atteint pour le bloquer aux autres joueurs.
La partie s’achève à la fin de la 9ème manche. Le décompte final prend alors en compte :
– Les points de victoire déjà accumulés
– Les points des Développements de fin de partie
– Les points des cartes Politiques jouées de fin de partie
– Les points de victoire donné par le produit de la valeur atteint sur la piste gloire par le nombre de jetons Connaissances avec des couronnes de laurier.
Le joueur ayant le plus de points de victoire après ce décompte remporte la partie.
Oui ou Non

- Une édition splendide, aussi bien au niveau des illustrations que du matériel. L’élégance même !
- Une iconographie et lisibilité impeccable
- Un livret de règles très clair et l’utilité du rappel des étapes de chaque manche sur les plateaux personnels
- L’orientation stratégique spécifique et historique des différentes Cité-États à incarner (avec leurs explications)
- Un jeu de « civilisation » relativement rapide du fait de la simultanéité
- Une mécanique accessible malgré des réflexions plus rigoureuses
- L’enjeu majeur du « draft » de cartes Politique en début de partie
- Une grande rejouabilité et variété de stratégies possibles
- Un mélange d’ingrédients ludiques efficace
- La frustration de ne pas pouvoir faire toutes nos prévisions en neuf manches très ramassées
- Fonctionne également parfaitement à deux joueurs

- Une illustration de couverture peu parlante sur le contenu réel du jeu
- Une expérience très solitaire, aux interactions inexistantes
- Un jeu de civilisation très mécanique, dans lequel on pousse des cubes sans immersion
- Un bon départ s’avère déterminant. L’écart se creuse progressivement sans perspective d’un retour adverse.
- La présence du hasard (lancers de dés et pioches de cartes Politique) pouvant rendre compliqué toute stratégie
En Résumé
KHÔRA est le petit dernier de la gamme « Expert » de Iello, dans laquelle on retrouve notamment les excellents TZOLK’IN, LE DILEMME DU ROI et LES RUINES PERDUES DE NARAK. Chaque nouveauté, annoncée dans la même lignée que ces derniers, fait évidemment grandement saliver, d’autant plus quand il s’agit d’un jeu de civilisation, en tout cas, sur le papier.
Et il n’y a pas mensonge sur la marchandise, KHÔRA est bien un jeu de civilisation dans lequel les joueurs vont tenter d’amener leur Cité-État grec au sommet de la gloire. On retrouve les éléments typiques de ce genre de jeu, à savoir la politique, le militaire, l’économie, la culture ou encore le commerce. Tout y est ou presque… En effet, si dans la forme KHÔRA articule ces différents aspects avec rigueur, le fond est un peu plus brouillon. L’immersion est inexistante tant la mécanique prend le pas sur l’histoire qui nous est racontée. Certes, des efforts de contextualisation ont été réalisés, comme les explications appréciables des Cité-États et de leurs spécificités, mais les joueurs passent la plupart de leur temps à pousser des curseurs sans réelle impression de développement.
Il découle, de ce manque d’incarnation, une ambiance glaciale autour de la table, accentuée par un design très élégant mais particulièrement froid et un système de jeu très solitaire. En effet, quasiment la totalité des phases d’une manche se déroule de manière simultanée, et sans aucune interaction entre les joueurs. Au final, chacun a le nez dans le guidon et le lève de temps en temps uniquement pour relire l’aide de jeu concernant le déroulement de la manche (particulièrement utile au passage). Ceci constitue un très gros soucis pour moi, qui apprécie la confrontation et les interférences, mais peut tout à fait satisfaire les joueurs plus calculateurs, aimant élaborer leur stratégie en toute sérénité. Autre point positif de ce système de jeu très « autistique », c’est un temps de jeu très limité. Les jeux brassant autant de paramètres et de mécaniques durent en moyenne bien plus de deux heures, là où KHÔRA, une fois les règles maitrisées, se maintient sous l’heure de jeu.
Et puis, pour en finir avec les points qui fâchent, KHÔRA possède bien plus de hasard que soupçonné. Les lancers de dés, au début de chaque manche, peuvent contraindre assez brutalement les possibilités d’actions des joueurs. Aussi, les cartes Politique en main, si elles orientent très clairement les stratégies, peuvent provoquer de grandes différences de capacités entre les joueurs. Le choix initial s’avère crucial, mais c’est ensuite des pioches plus ou moins heureuses qui façonnent les tactiques entreprises. De cette façon, les débuts de parties sont déterminants. Les capacités acquises et les pouvoirs débloqués peuvent creuser un écart considérable, qu’il sera impossible de combler. En ce sens, plus on gagne et plus on gagne !
Mais malgré tous ses petites défaillances, KHÔRA reste étonnamment très plaisant et fluide. Le mélange de ses différents ingrédients fait passer un excellent moment et donne envie d’y revenir pour défendre une autre puissance et tester d’autres stratégies. L’asymétrie des différentes Cité-États, basée sur des faits historiques crédibles, est un plus considérable. Le jeu propose une richesse réflexive considérable nichée dans des règles plutôt très accessibles. Les actions sont en ce sens très simples à réaliser. La complexité provient plutôt de leur agencement entre elles afin que l’une puisse profiter à l’autre par exemple. KHÔRA reprend les codes de certains jeux de civilisation pour être au final plutôt singulier en assumant ce mélange des genres. L’utilisation des cartes Politique m’a, par exemple, clairement fait penser à 7WONDERS alors qu’elle est objectivement bien différente. Tout s’articule brillamment, notamment les ascensions sur les différentes pistes permettant une montée en puissance cohérente.
Et puis, la qualité de l’édition est un atout considérable. Le matériel est très agréable, bien pensé et extrêmement lisible, ce qui simplifie grandement l’expérience de jeu. Une fois lu, le livret de règles peut être rangé définitivement. Le thermoformage de la boîte est impeccable. Tout est fait pour rendre le titre efficace et immédiatement exploitable dans ses moindres détails. KHÔRA n’est sans doute pas le jeu le plus expert de la gamme, mais il représente un équilibre intelligent entre plaisir et complexité.